A / Le nucléaire fait peur
Dans l'opinion publique cependant, le nucléaire peine à convaincre. D'après un sondage de l'institut BVA pour l'association Agir pour l'Environnement en juillet 2006, 8 interrogés sur 10 estimaient que le nucléaire était une technologie à risque. 31% des interrogés seulement estimaient que le nucléaire étaient une énergie à développer face aux enjeux économiques d'avenir, au profit des énergies renouvelables (plus écologiques) qui ont obtenu 84% d'avis positifs selon ce sondage.
Cette peur du nucléaire a surtout pour origine, et a été nourrie par plusieurs accidents mémorables. En 1986, un incident à la centrale nucléaire Lénine, en Ukraine, a entraîné un énorme relâchement de radioactivité dans l'atmosphère et a mené à ce qu'on appelle désormais « la catastrophe de Tchernobyl ». Le relâchement de radioactivité dans l'atmosphère a entraîné une exposition aux radiations des populations environnantes (145 000 km² ont été « significativement contaminés », avec une concentration en césium 137 supérieure à 37 kBq/m²). Or, ces expositions aux radiations ont provoqué le développement d'un certain nombre de pathologies dans les zones environnantes : on a observé une recrudescence des cancers de la thyroïde, du pancréas, de la vessie et les leucémies, qui sont 2 à 3 fois plus nombreuses qu'avant l'accident. En effet, le césium 137 a une incidence sur de graves pathologies cardiaques, rénales, endocriniennes et immunitaires, surtout chez les enfants. Depuis 20 ans, les atteintes génétiques et malformations congénitales chez les nouveau-nés en Biélorussie sont 3 à 4 fois supérieures à la normale.
Cette catastrophe, qui a créé un tollé médiatique à son époque, n'est malheureusement pas la dernière dans son genre. Le 25 juillet 2006, une panne de la centrale nucléaire à Forsmark (en Suède) a failli provoquer la perte de contrôle d'un réacteur nucléaire. Le système de générateurs d'électricité automatisé n'ayant pas fonctionné correctement, c'est une chance que les employés de la centrale aient réussi à relancer le système à temps, sinon l'incident aurait pu tourner au « cauchemar » selon un ingénieur ayant participé à la construction de la centrale. Si le système n'avait pas été relancé à temps, le cœur de la centrale aurait fondu et il y aurait eu des fuites radioactives. L'incident fut classé niveau 2 (sur 7) sur l'échelle internationale des risques nucléaires, qui évalue les accidents liés au nucléaire en fonction de leurs conséquences.
Dans un contexte très récent, les catastrophes naturelles subies par le Japon ont été la source d'une polémique importante à propos de l'énergie nucléaire : suite au séisme de magnitude 9.0 qui a sévi sur les côtes japonaises et à ses nombreuses répliques, il s'est produit plusieurs accidents nucléaires. Suite à une défaillance du système électrique ayant engendré une panne de celui de refroidissement, une importante quantité s'est dégagée d’un des réacteurs et a provoqué une explosion de l'enceinte de confinement, libérant un « nuage radioactif », qui arrivera plus tard sur la France (même si il aura très peu d’effet sur nous)... Cependant, cette catastrophe, bien que très grave, est due à des causes externes et n'est pas l'apanage du nucléaire : au Japon, la scission d'un barrage lors du même séisme a provoqué l’emportement de milliers de maisons ... provoquant bien plus de morts (directes) que les catastrophes nucléaires (cependant, le nombre de victimes de la radioactivité risque d'être amplement plus important). Il ressort de cet évènement un retour aux mouvements anti-nucléaires.
De plus, le nucléaire n'est pas seulement utilisé dans le cadre de l'énergie nucléaire. En effet, la limite entre le nucléaire civil et le nucléaire militaire est ténue: lorsqu'un pays dispose d'assez de matières fissiles pour faire fonctionner une centrale nucléaire, il en dispose aussi d'assez pour dépasser le seuil de la masse critique permettant de faire une bombe nucléaire. En 1945 à Hiroshima est utilisée pour la première fois l'arme nucléaire, qui exploite la fission nucléaire pour provoquer un souffle, de la chaleur, une impulsion électromagnétique et une irradiation. On estime qu'elle libère une énergie équivalente à 15 000 tonnes de TNT. Humainement, le nombre exact de victimes n'a jamais été connu, mais on estime son nombre de morts entre 90 000 et 160 000 personnes (avec une population entre 340 000 et 350 000 habitants). Matériellement, 60% de la ville fut dévastée et toutes les résidences traditionnelles (en bois, par exemple) furent rasées à un rayon de 2 km de l'hypocentre de l'explosion (même si une partie des bâtiments résistèrent, étant conçus en béton armé selon des normes antisismiques). L'arme nucléaire ne fut plus jamais utilisée en tant que telle, mais uniquement en force de dissuasion. En 1962 survient la Crise des Missiles de Cuba, qui est la période jugée la plus tendue de la guerre froide, qui survient après la découverte de rampes de lancement de missiles (probablement nucléaires). Le monde est alors sous tension, craignant une attaque nucléaire. Face à l'énorme danger que représentait ce type d'arme (qui évolua au fil des décennies), un traité de non-prolifération nucléaire fut signé en 1968 par 191 pays, qui vise à réduire le risque que l'arme nucléaire ne se répande dans le monde. Ces évènements ont renforcé la peur de l'arme nucléaire dans l'opinion publique.
Le mouvement antinucléaire connaît ainsi une montée grâce à la montée du mouvement écologique. Ils réclament la fin de l'énergie nucléaire, car ils craignent de nouveaux accidents (comme Tchernobyl), des attaques nucléaires et prônent les nouvelles formes d'énergie, comme les énergies renouvelables.
Autocollant prônant la lutte contre le nucléaire - Source : Le blog du colporteur